Histoire tourmentée d'un "lieu de mémoire": le Musée du Paysan Roumain avant, pendant, apr?s le communisme
Marianne Mesnil
 

Localisation et architecture du Musée

La massivité de la construction qui abrita le "Musée d'art", en fait l'un des bâtiments publics les plus imposants de la ville. En outre, il est construit dans le plus pure style "neo-brancovenesc", tr?s ? l'honneur ? cette époque o? l'esthétique architecturale veut elle aussi exprimer un caract?re national. Le bâtiment rappelle les habitations prestigieuses des boyards du  XVIIIe si?cle. C'est donc un clin d'?il ? un passé ? la fois rural et princier. En outre, sa localisation dans la ville, le long de la "Chaussée", au sein des beaux quartiers du nord de la capitale, indique l'intér?t de la bourgeoisie, en ce début du XXe si?cle, pour le projet dont un tel édifice est porteur. De fait, c'est en s'appuyant sur cette bourgeoisie et sur ses représentants dans la classe politique que l'infatigable Tzigara-Samurcas va réussir ? mener ? bien ce projet grandiose dont il ne pourra, bien entendu, soupçonner les détournements idéologiques (dont le bâtiment deviendra le "théâtre").

Fondé le 1er octobre 1906, le musée changera de nom ? plusieurs reprises: il s'intitule tout d'abord "Le Musée d'Ethnographie, d'Art National, d'Art Décoratif et Industriel".  Plus tard il reçoit le nom de "Musée d'Ethnographie, d'Art National" ? Puis, en 1912, il prend un nouvel essor et reçoit le nom de "Musée d'Art National".  C'est ? ce moment que le nouveau bâtiment du 3, avenue Kisseleff commence ? s'élever. Mais la construction du musée sera bientôt interrompue.  (Bănăţeanu, op. cit.)

2. "L'âge du ? national-communisme ?" (1951 ?1989)

Mais, avec l'instauration du régime communiste, l'imposant bâtiment va bien vite ?tre convoité et devenir le lieu d'un nouveau sanctuaire: ce sera le "Musée du Parti Communiste Roumain". C'est d'ailleurs tout le quartier des vieilles demeures bourgeoises, de Baneasa ? la "Chaussée", qui va faire l'objet d'une telle appropriation par la "nomenklatura". Le nouveau pouvoir instaure son "parcours officiel ", allant de l'aéroport de Băneasa jusqu'au centre ville, en passant par la "maison de la Presse" (Casa Scânteii), inévitable sentinelle du plus pur style stalinien, vers les beaux quartiers de "Primavar?" (réinvestis par ces Apparatchiks), débouchant sur de gigantesques places bordées de divers bâtiments officiels, parmi lesquels celui du Conseil des Ministres. Sur ce tracé, se dresse le désormais nommé "Musée du Parti Communiste".

On va alors assister ? la disparition progressive du musée "national-libéral" de la "Chaussée", qui va "transiter" ? la "Calea Victoriei" avec son directeur, le muséographe-ethnographe T. Bănăţeanu, avant de s'effacer compl?tement de la sc?ne urbaine de l'époque "national-communiste".

En 1957, une édition du catalogue du musée de la Calea Victoriei, paraît en trois langues (roumain, russe, français), sous la direction de T. Bănăţeanu. On peut y lire, en introduction, un historique du musée ainsi que les principales orientations du projet muséal Le nom d?A. Tzigara-Samurcaş est cependant omis. Et rien n'est dit non plus, sur la nouvelle affectation du bâtiment de la chaussée Kisseleff, devenu Musée du Parti Communiste Roumain.

Le musée qui ouvre ses portes en ao?t 1954, au 107 Calea Victoriei" ( Palais Ştirbei), s'organise en 15 salles selon une lecture "marxiste" de l'histoire de la paysannerie: des "premi?res organisations sociales: la commune primitive, l'esclavage et l'époque féodale", ? "l'évolution de l'art populaire dans le régime capitaliste" dont "la politique nationaliste réactionnaire "n'a pas manqué de "dégrader quelques-unes des formes de l'art populaire ?aboutissant ? des "formes hybrides, tendant ? désagréger la création traditionnelle" (p. 18)

Ce Musée d'Art populaire de la République Populaire Roumaine fermera bientôt lui aussi. Les collections et le matériel ethnographiques seront alors entreposés au Musée du Village.

 <<  1  2  3  4  5  6  7  8  9  10  >>
 
 
 

 
Martor nr 1/1996
Martor nr 2/1997
Martor nr 3/1998
Martor nr 4/1999
Martor nr 5/2000
Martor nr 6/2001
Martor nr 7/2002
Martor nr 8-9/2003-2004
Martor nr 10/2005
Martor nr 11/2006
Martor nr 12/2007
 

© 2003 Aspera Pro Edu Foundation. Toate drepturile rezervate. Termeni de confidentialitate. Conditii de utilizare