O? sont les f?tes d?antan?(Jeunesse rose / jeunesse morose)
Şerban Anghelescu et Petre Popovăţ
 
Texte traduit par Laurenţiu Zoicaş

Petre Popovăţ : En effet, pas question. Une fois, un copain est rentré en s'accrochant ? un camion-citerne de la voirie, qui arrosait la chaussée. Les thés étaient organisés surtout en été, lors des longues vacances scolaires et universitaires. La courtoisie était monnaie courante : toujours, quand on invitait une fille ? danser, on s'inclinait et on lui demandait la permission de vous accorder la danse et, ? la fin, on lui baisait la main.

Je reviens, involontairement, ? mon obsession des v?tements. Nos thés, on avait l'habitude d'y aller élégamment v?tus (?bien sapés?) : costume, chemise blanche, cravate. J'avoue que j'ai raté bien des parties faute d'habits. J'avais une paire de chaussures dont la semelle était trouée. J'ai essayé de fixer ? l'intérieur un carton découpé dans une chemise de dossier, mais ça n'a pas marché et j'ai d? rester chez moi. La mode était aux chaussures ? tr?s, tr?s grosse semelle.

Şerban Anghelescu : N'était‑ce pas un trait du ?malagambisme? ?

Petre Popovăţ : Si, tout ? fait. Ce terme avait été créé ? partir du nom de Sergiu Malagamba, un cél?bre batteur pour des musiques ? danser (rappelant parfois le jazz), qui s'habillait d'une façon tr?s excentrique. C'était ce qu'avait été, pour les Américains, ? partir des années quarante, Dizzy Gillespie, dont les cravates multicolores étaient cél?bres.

Par contre, les barbes n'étaient pas acceptées, et j'ai pu assister ? des sc?nes pénibles, o? des groupes de miliciens, accompagnés de jeunes ?ouvriers?, attrapaient des barbus, qu'ils traînaient chez le coiffeur, o? on les rasait immédiatement. De m?me, quand les blue-jeans sont apparus, on leur donnait la chasse et ils étaient coupés, en pleine rue, aux ciseaux ; pareil pour les minijupes.

A un moment donné, il n'a plus été obligatoire d'aller aux parties en costume-cravate. Des pulls sport venaient d'apparaître ; on les appelait des ?serviettes éponges?, parce qu'ils étaient faits en tissu peluché, aux couleurs pastel ; ils co?taient 400 lei (en 1957‑1958 !) et on pouvait s'en procurer au marché au puces, chez les gens qui vivaient de la revente de ce que leurs parents de l'étranger leur envoyaient. Tout jeune homme r?vait de posséder une telle ?serviette éponge? et, d?s qu'il se la procurait, il l'arborait ? un thé. Un copain, véritable don Juan, en avait quatre : blanc, bleu clair, jaune et rouge. Chaque semaine, il changeait de pull, et de copine aussi...

Deux mots encore sur nos vacances d'hiver, ? la montagne. Comme bon nombre d'él?ves bucarestois, j'ai appris ? skier dans les cél?bres colonies de vacances organisées par le ?p?re Tilică? alias Stelian Gheorghiu, notre pittoresque prof de gym, au lycée ?Sfîntul Sava?. Moyennant une somme modique, on pouvait passer deux semaines ? la montagne, pendant les vacances d'hiver et de printemps, au chalet ?Vîrful cu dor?. Le jour, nous faisions du ski, et remontions la piste ? pied, puisqu'il n'y avait ni téléphériques ni remonte-pentes. Nous remontions la piste par étapes, et nous descendions beaucoup trop vite par rapport ? l'effort qui nous attendait ? la remontée. Les soirs, nous nous amusions ? jouer ? des jeux innocents et ? faire toutes sortes de farces de notre âge. Apr?s le lycée, notre groupe a continué ? aller ? la montagne, ? notre compte. Le ski, ? l'époque, n'était pas un sport cher, mais le gros probl?me, c'était de se procurer l'équipement. Nous avions tous, au grenier, de vieux skis en bois, sans carres, qu'avaient abandonnés divers vieux oncles. Des chaussures de ski (souvent dépareillées), je m'en procurais au syndicat auquel appartenait ma m?re. C'était un vieux magasin qui sentait horriblement le moisi et, au bout d'une heure de fouille, je finissais toujours par dénicher deux chaussures de pointure 41, m?me si la gauche ne ressemblait gu?re ? la droite. J'y trouvais aussi une loque d'anorak. Quant au pantalon, ma m?re me les improvisait ? partir d'un vieux pantalon de semaine : elle leur faisait un pli, attachait un large élastique en guise de sous-pied et ça y était !

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