A.M. Vous disiez que l?on pourrait sauver les églises en les abritant dans les résidences épiscopales, métropolitaines ou dans les enceintes monastiques. L?, elles auraient un double caract?re: espace sacré, objet culturel. L?église de Bejani, dans la cour du musée, n?est-elle pas dans la m?me posture? Seulement, dans ce cas, c?est une institution la?que qui a proposé la réunion de ces deux conditions. Horia Bernea C?est un privil?ge que d?avoir trouvé un pareil exemplaire: une minuscule église ?classique?, super-classique je dirais: par la forme, par une sorte de mesure en toutes choses, par sa sobriété. Nous n?avons pas encore pu en restaurer la peinture, qui est merveilleuse et que tous les Bucarestois devraient voir. Combien d?entre eux parviennent jusque dans les creux les plus reculés des montagnes, pour avoir la chance de rencontrer cette modeste perfection? Apr?s la restauration, il y aura une nouvelle consécration, puis, lors des grandes f?tes, on pourra y célébrer l?office. On la rendra ainsi au culte et ? la culture en m?me temps. Revenons au traitement de l?objet. Il existe une mani?re tr?s sév?re, tr?s géométrique et distante de traiter l?objet: l?enregistrer sur ordinateur, en inventorier chaque élément et ses fonctions; construire un mod?le sémantique froid et muséifier l?objet en conformité avec ce mod?le. Ce qui contraste brutalement avec la façon dont l?objet est traité (l?église, en l?esp?ce) par ses ?utilisateurs?, par les fid?les. Sans inhibition aucune, ils font de l?église un objet en marche, en perpétuelle métamorphose. S?ils ont besoin d?entreposer quelque chose, ils ajoutent un appentis pr?s de l?entrée, ils ferment le narthex, taillent encore une porte... Rappelons-nous l?aspect auquel en était parvenue l?église Sfântu Gheorghe du vo?vode Brâncoveanu au centre de Bucarest, ? la suite des interventions successives des fid?les et tr?s chrétiens paroissiens: on ne pouvait m?me plus deviner l?église originelle, sous les interventions et les ajouts. Les deux attitudes évoquées me semblent ?tre des façons d?altérer l?objet. Or, nous essayons de récupérer quelque chose d?une attitude naturelle envers l?objet. On ne peut traiter une église exclusivement en tant qu?objet de patrimoine, pétrifié, catalogué, exposé dans une vitrine ou enfermé au dépôt. Il ne faut pas lui faire abandonner sa fonction, sa vie sacrée. Il faut tâcher de collaborer avec l?esprit de l?objet. |