A.M. En quoi consiste cette honn?teté dont vous parlez? Horia Bernea Ça veut dire ne pas passer ? la réalisation d?une salle que lorsque celle-ci a pris nettement forme dans votre esprit. Non pas une forme arr?tée, écrite sur papier, comme on le croit d?habitude, mais une motivation. Il faut savoir attendre jusqu?? ce que la motivation de l?entreprise apparaîsse d?elle m?me, une motivation profonde: c?est-?-dire le ton et la structure qui permettent d?attaquer la chose avec fraîcheur, de façon adéquate. Il faut sentir que la salle ou le th?me en question sont d?une importance vitale, non seulement pour le musée, tel qu?il s?est développé jusqu?? présent, mais ?pour le monde entier?, sentir que l?on a ? dire quelque chose de nouveau et d?essentiel. Et que l?on a trouvé l?expression que ce quelque chose demande ? recevoir. Voici peut-?tre le secret de notre musée, ou bien la bonne façon de le décrire: non pas un musée réalisé par des projets, mais par un état projectif, ininterrompu. Il y a en ce sens un danger, et je crains que nous ne puissions pas l?éviter tout ? fait: le danger de mettre en circulation des recettes, de croire que nous possédons un style qui peut ?tre appliqué en tant que ?méthode de travail?. Or, nous ne devons pas renoncer au désir d??tre vivants et authentiques dans la mesure du possible. Sans ce degré d?investissement de soi, on peut obtenir des résultats intéressants peut-?tre, mais non créateurs. En second lieu, nous affrontons ici sans cesse la question de l?adéquation, que j?évoque souvent. Il y a des choses qu?on ne saurait pas traduire au niveau visuel, mais qui, par exemple, acceptent une expression musicale. Un musée ne peut pas se permettre de traiter le th?me des souffrances de la paysannerie au XVIIIe si?cle, pour que je donne un exemple parmi d?autres. C?est un th?me que l?on peut traiter ? travers les textes, les mémoires, les anecdotes, les mélodies... Mais alors on ne fait plus du musée, on fait un livre. La scénographie non plus ne saurait, selon moi, ?tre integrée dans un musée; celui qui croit que musée et scénographie sont convergents, qu?ils peuvent collaborer, je pense que celui-l? se trompe. Tout comme il me semble aussi impropre de parler de ludique ? propos de ce que nous faisons ici. Le spectacle, le ludique n?ont rien ? faire avec le musée. Car, si l?aspect ludique op?re partout, il n?est plus ?productif?! En ce qui me concerne personnellement, si j?ai convenablement acc?s ? l?acte de faire du musée, c?est, je pense, ? cause de la peinture que je fais. Les deux activités se sont réunies en quelque sorte, elles coop?rent; ? un moment donné j?ai réussi ? m?assimiler l?activité muséographique, de la m?me mani?re que je me suis assimilé la peinture. Je l?ai assumée pareillement: elle est devenue une composante naturelle dans l?univers de mes vingt-quatre heures. |